La qualité de l’eau à Bordeaux : une composition à surveiller de près
L’eau du robinet à Bordeaux est régulièrement qualifiée de potable et contrôlée selon les normes sanitaires européennes. Mais derrière cette apparente conformité, une question se pose de plus en plus souvent parmi les Bordelais : quid des résidus de pesticides dans notre eau quotidienne ?
Dans une région viticole réputée, où les traitements phytosanitaires sont couramment utilisés, il est légitime de s’interroger sur la présence de ces substances chimiques dans les ressources en eau. Cet article fait le point sur la situation à Bordeaux, s’appuyant sur les données disponibles, les études récentes et quelques comparatifs utiles pour comprendre ce que l’on boit vraiment dans la métropole girondine.
Des substances indésirables potentiellement présentes
Depuis 2003, la réglementation impose un seuil de 0,1 µg/L pour chaque pesticide dans l’eau destinée à la consommation humaine — et un maximum cumulé de 0,5 µg/L pour l’ensemble des molécules détectées.
Bien que les analyses effectuées par l’Agence Régionale de Santé (ARS) montrent généralement que l’eau bordelaise respecte ces seuils, plusieurs molécules préoccupantes sont régulièrement détectées. Et si les concentrations restent techniquement « conformes », elles n’en demeurent pas moins problématiques sur le long terme, surtout en cas d’exposition chronique.
Parmi les molécules identifiées ces dernières années, on retrouve :
- Le métolachlore, un herbicide abondamment utilisé dans la culture du maïs et de la vigne.
- L’atrazine et son métabolite l’atrazine-deséthyl, interdits en France depuis 2001 mais encore détectables dans certaines nappes phréatiques en raison de leur persistance.
- Le diméthoate, un insecticide dont certaines dérivées peuvent apparaître dans les analyses bien après l’arrêt de l’épandage.
Ces polluants proviennent majoritairement du ruissellement agricole ou de la percolation dans les sols. À Bordeaux, où beaucoup d’eau provient de la nappe de l’Eocène ou du Sidérolithique, ces contaminations peuvent remonter à plusieurs années, preuve de la lenteur du processus de renouvellement de certaines réserves souterraines.
Quels sont les réseaux les plus exposés dans la métropole ?
La Communauté urbaine de Bordeaux (aujourd’hui Bordeaux Métropole) est alimentée par différents forages, répartis dans toute la région. Parmi eux :
- La nappe de l’Eocène, exploitée sur l’axe Cestas – Pessac – Mérignac.
- La nappe du Sidérolithique, principalement autour de Bouliac et Artigues-près-Bordeaux.
- La nappe des sables infra-molassiques, vers les communes du sud-est de la Métropole.
Toutes ces nappes ne présentent pas les mêmes niveaux de vulnérabilité. Par exemple, la nappe du Sidérolithique, bien que protégée par des couches argileuses, montre parfois des signes de contamination lente — vraisemblablement due à des infiltrations anciennes. À l’inverse, les forages situés à proximité des zones viticoles, même éloignés de la Garonne, peuvent afficher des concentrations plus élevées, notamment durant les périodes de lessivage après fortes pluies.
Des cas concrets d’alerte dans les communes voisines
Ces dernières années, plusieurs communes de la Gironde ont attiré l’attention en raison de dépassements ponctuels ou d’analyses préoccupantes en matière de pesticides dans l’eau distribuée.
En 2021, à Artigues-près-Bordeaux, des campagnes de mesure ont mis en évidence la présence du métolachlore dans l’eau du robinet à une concentration avoisinant 0,08 µg/L. Bien qu’en dessous du seuil réglementaire, il s’agit d’un taux élevé sur une période prolongée. La mairie a alors lancé des campagnes d’informations et envisagé des investissements pour renforcer les systèmes de traitement.
Plus récemment, des analyses à Saint-Médard-en-Jalles ont révélé la présence de résidus de déséthylatrazine autour de 0,06 µg/L — là encore, bien que conforme, ce niveau questionne sur l’héritage chimique laissé par des décennies de culture intensive.
Comment réagit Bordeaux Métropole ?
Face à ces préoccupations, Bordeaux Métropole a mis en place plusieurs mesures destinées à sécuriser la ressource et à rassurer les usagers :
- Surveillance renforcée des forages dits « sensibles » avec des analyses plus fréquentes.
- Protection des zones de captage via des conventions avec les agriculteurs pratiquant à proximité (incitations à développer l’agriculture bio, mise en jachère de certains périmètres).
- Projet de diversification des ressources pour limiter la dépendance à certains forages vulnérables.
- Investissements dans la filtration des micropolluants, via du charbon actif ou l’osmose inverse selon les sites.
Mais tous ces efforts mettent du temps à porter leurs fruits, et nombre de communes n’ont pas encore procédé à une modernisation complète de leurs installations de traitement.
Quels sont les risques réels pour la santé ?
Sur ce point, les experts sont prudents. À faible dose, les pesticides présents dans l’eau ne provoquent pas de troubles immédiats. Cependant, l’exposition chronique à certains résidus de pesticides peut être liée à des problèmes de santé à long terme, notamment des perturbations endocriniennes, des troubles neurologiques ou des risques accrus de certains cancers.
L’un des problèmes les plus complexes reste la synergie entre molécules : si chaque substance est mesurée individuellement, on connaît encore mal les effets cumulés de plusieurs résidus présents, même sous les seuils réglementaires.
Sans céder à l’alarmisme, il semble donc raisonnable de vouloir minimiser l’exposition quotidienne, surtout pour les populations sensibles comme les enfants ou les femmes enceintes.
Que pouvez-vous faire à votre échelle ?
En attendant une amélioration systémique, il existe des solutions relativement accessibles pour réduire l’exposition aux résidus de pesticides dans l’eau du robinet.
- Utiliser un filtre à charbon actif, compatible avec de nombreux modèles de carafes, robinets ou systèmes sous évier.
- Investir dans un purificateur d’eau domestique plus avancé (osmose inverse notamment), si l’on souhaite éliminer une large gamme de contaminants, y compris les pesticides, nitrates et résidus médicamenteux.
- Se renseigner régulièrement sur la qualité de l’eau distribuée dans votre commune, via le site du Ministère de la Santé ou de l’ARS Nouvelle-Aquitaine.
Pour ceux qui hésitent encore entre ces solutions, notre page comparatif de purificateurs peut vous aider à faire un choix éclairé en fonction de vos besoins et de votre budget.
Vers une gestion durable de l’eau en Gironde
L’affaire des pesticides dans l’eau à Bordeaux s’inscrit dans une problématique plus vaste : celle de la transition agricole et de la préservation des ressources en eau. Avec le réchauffement climatique, la croissance démographique et les exigences de potabilité toujours plus élevées, les enjeux autour de l’eau du robinet vont continuer à s’intensifier.
Heureusement, les mentalités changent. De plus en plus d’agriculteurs girondins s’engagent dans des pratiques respectueuses de l’environnement et des nappes phréatiques. Certaines communes testent même des modèles de coopération entre distributeurs d’eau, agriculteurs et associations locales pour co-construire des solutions durables.
Une chose est certaine : la vigilance citoyenne joue un rôle crucial. En s’informant sur la qualité de l’eau, en questionnant les choix locaux de traitement ou en équipant son foyer d’un système de filtration adapté, chacun peut contribuer à sa façon à une consommation plus sûre et plus responsable.